FISCHER, GOULD, et bien d'autres
Retour aux hommes .
Bien évidemment , ce sont des noms d'hommes que l'on retrouve le plus abondamment dans la dénomination des oiseaux . Il n'est pas question de les citer tous : même en ne citant que ceux de nos oiseaux d'élevage , il faudrait presque un dictionnaire .
Comme on l'a compris , le descripteur d'une espèce nouvelle pouvait honorer une personne de son choix . L'usage voulait que l'on ne se nomme pas soi-même .
Quelques-uns ont cependant dérogé à la règle :
William Gambel (1823-1849) a donné son propre nom en 1843 au Callipepla gambelli ( Colin de Gambel ) .
Andrew Adams (1827-1882) fit de même en 1851 pour Montefringilla adamsi ( Niverolle du Tibet ) .
Adulphe Delegorgue (1814-1850) se dédia en 1847 deux oiseaux : Columba delegorguei ( Pigeon de Delegorgue ) et Coturnix delegorguei ( Caille arlequin ) .
Mais en règle générale, l'auteur d'une espèce nouvelle choisissait , soit un nom latin "classique" , soit le nom ( ou le prénom) de celui ( ou celle) qu'il voulait honorer . Comme , à son tour , son nom pouvait être donné à un oiseau par un autre auteur , on peut ainsi trouver pour le même nom , deux cas de figure :
- Espèce "dédiée à" : Canard d'Oustalet Anas oustaleti (Salvadori 1894)
Diamant de Peale Erythrura pealii (Hartlaub 1852)
- Espèce "décrite par" : Verdier d'Oustalet Carduelis ambigua (Oustalet 1896)
Carpophage de Peale Ducula latrans (Peale 1848) .
On trouve parfois des exemples de réciprocité où 2 auteurs s'honorent l'un l'autre :
- Chardonneret gris Carduelis lawrencei (Cassin 1850)
- Colombe de Cassin Leptotila cassini (Lawrence 1867) .
Il arrive que le nom de genre et celui d'espèce honore la même personne :
Phasianelle de Reinwardt Reinwardtoena reinwardtii (Caspar G.C. Reinwardt 1773-1854)
Eclectus de Geoffroy Geoffroyus geoffroyi (Etienne Geoffroy Saint-Hilaire 1772-1844)
Certains noms de genres sont dédiés à de grands ornithologues ; citons simplement :
Verreauxia africana Picumne de Verreaux (le français Jules Verreaux 1807-1873) .
Hodgsonius phaenicuroides Bradybate à queue rouge (le britannique Brian H. Hodgson 1800-1894) .
Ridgwayia pinicola Grive aztèque (l'américain Robert Ridgway 1850-1929) .
On trouve même des cas où le genre et l'espèce portent le nom de 2 personnes différentes :
Newtonie d'Archbold Newtonia archboldi (Alfred Newton 1829-1907) (Richard Archbold 1907-1976) .
Enfin, le nom français choisi provient parfois , non pas de celui de la sous-espèce nominale , mais d'une autre sous-espèce décrite plus tard :
Gallicolombe de Bartlett , le nom donné à l'espèce Gallicolumba criniger provient en fait de la sous-espèce G. c. bartletti décrite en 1864 par Sclater (Edward Bartlett, ornithologue anglais1836-1908 ) .
Conure de Souancé désigne Pyrrhura melanura dont la sous-espèce P. m. souancei a été décrite par Jules Verreaux en 1854. Cette même année, Charles de Souancé (1823-1896) décrivait, avec son oncle François Victor Masséna, une autre espèce bien connue des éleveurs de psittacidés, la conure de Molina Pyrrhura molinae ( dédiée à Juan Ignacio Molina, ornithologue chilien 1740-1829) .
Certains ornithologues cumulent les espèces portant leur nom , en latin ou en français : le record est sans conteste détenu par P.L.Sclater puisqu'on trouve 18 espèces à son nom ; il faut dire qu'il était membre d'un bon nombre de sociétés savantes , qu'il entretenait d'étroites relations avec beaucoup d'ornithologues de son époque et qu'il est l'auteur de plus de 1400 publications !
D'autres n'en sont pas loin : Temminck (14) , Cassin (13) , Verreaux et Hogdson (12) , Salvadori (11) .
En contrepartie , il était , je pense, assez naturel pour tous ces ornithologues , en leur dédiant une espèce , de remercier tous ceux qui les aidaient dans leur travail : les collecteurs qui vont dans les contrées lointaines capturer les oiseaux , les taxidermistes qui les naturalisent , les collectionneurs qui les achètent , les artistes qui les peignent , sans parler des souverains ou des mécènes qui financent les expéditions , de leurs collègues d'autres disciplines qu'ils côtoient dans de multiples sociétés savantes ou des membres de leur famille .
Il n'est donc pas étonnant de retrouver parmi les noms des oiseaux présents dans nos concours ( en sections F ou K ), non pas ceux d' ornithologues réputés , mais ceux de personnes souvent moins connues .
Voici quelques exemples parmi les plus fréquemment rencontrés :
- Inséparable de Fischer Agapornis fischeri ; Gustav Fischer (1848-1886) est un explorateur et médecin allemand qui mena de 1876 à 1885 plusieurs expéditions en Afrique orientale , atteignant le lac Victoria et le pays masaï . Peu de temps après son retour en Allemagne , il meurt en 1886 , des suites d'une fièvre contractée pendant ses voyages .C'est son ami Anton Reichenow (1847-1941) qui décrira les spécimens qu'il avait rapportés de ses expéditions et , cas unique , leur donnera à chaque fois son nom : c'est ainsi qu'il existe un touraco , un bulbul , une veuve , un spréo , un gobemouche , tous de Fischer ! IL n'y a que la ptilope de Fischer qui doive ce nom à Bruggemann .
- La Tourterelle de Reichenow (Streptopelia reichenowi) et le Sénégali de Reichenow (Cryptospiza reichenovii) sont 2 des 10 espèces qui portent le nom de cet ornithologue allemand . Lui aussi fit une expédition en Afrique centrale avant de succéder à son beau-père Jean Cabanis (1816-1906), d'abord au muséum de Berlin en 1888 , puis à la Société ornithologique allemande en 1893 . Grand spécialiste de l'avifaune africaine , il décrira dans un ouvrage en 3 volumes (Die Vögel Africas) plus de 2500 espèces de ce continent , dont un bruant Emberiza cabanisi qu'il dédie en 1875 à celui à qui il doit sa carrière . Tout récemment , à Porto , les juges exotiques ont mis bien du temps avant de trouver le nom d'un plocéidé qu'il avait à juger : c'était un républicain de Cabanis Pseudonigrita cabanisi !
- Capucin de Hunstein Lonchura hunsteini ; né en Allemagne , Carl Hunstein (1843-1888) , après avoir émigré aux Etats Unis , partit chercher de l'or en Nouvelle Zélande . Cette entreprise ayant échoué , il devint collecteur de plantes et d'oiseaux en Nouvelle Guinée . C'est lui qui y découvrit plusieurs nouvelles espèces de paradisiers : outre celui de Stéphanie déjà cité , il y a le paradisier de Meyer (Epimachus meyeri) , le paradisier bleu (Paradisaea rudolphi) dédié au prince Rodolphe le mari de Stéphanie et le paradisier de Guillaume (Paradisaea guilielmi) commémorant Guillaume II d'Allemagne (1859-1941) .
- Diamant de Bicheno Taenopygia bichenovii ; le britannique James E. Bicheno (1785-1851) avant d'être nommé administrateur colonial en Tasmanie en 1842 était un botaniste amateur qui avait assisté Sir William Jardine dans la préparation de son ouvrage "Illustrations of Ornithology" . C'est sans doute à ce titre que Vigors et Horsfield lui dédièrent en 1827 ce petit estrildidé , bien connu dans nos concours. Un ville de Tasmanie porte également son nom .
- Perruche de Pennant Platycercus elegans (Gmelin 1788) ; comme Bicheno , Thomas Pennant (1726-1798) n'est pas ornithologue et n'est honoré que par un seul oiseau . Sans diplomes , il s'est cependant passionné d'abord pour la géologie et les fossiles , puis pour la zoologie , publiant "British zoologia" , une compilation en 4 volumes des connaissances de son époque . Il est surtout connu pour les récits de ses multiples voyages à travers l'Europe et ses nombreuses correspondances avec des artistes de son époque (Linné , Buffon , Voltaire , entre autres ) .
- Verdier d'Oustalet Carduelis ambigua (Oustalet 1896) ; Emile Oustalet est un zoologiste français qui co-signa avec le père Armand David (1826-1900) "Les oiseaux de la Chine" en 1877 et étudia les 160 spécimens que Jean Dybowski (1856-1928) avait ramenés de son expédition au Congo .
- Géopélie de Maugé Geopelia maugei (Temminck 1809) ; parlant de cet oiseau , ce dernier écrit : "Le naturaliste à qui nous sommes redevables de la connaissance de cette belle espèce , n'ayant pas eu le bonheur de retourner dans sa patrie , il nous a paru normal de la lui dédier" .En effet René Maugé de Cely , au cours d'une expédition qu'il effectuait sous la conduite de Nicolas Baudin dans les mers du Pacifique sud , mourut en février 1802 en atteignant la Tasmanie . Il y est enterré sur la petite île Maria au large de sa côte orientale en un endroit appelé le point Maugé .
- Perruche de Sparrman Cyanoramphus novaezelandiae (Sparrman 1787) mieux connue des éleveurs sous le nom de Kakariki à front rouge ; Anders Sparrman est un médecin suédois ayant exercé en Chine et en Afrique du Sud . C'est de là-bas qu'il rejoint la 2ème expédition de Cook dans les mers australes , engagé comme assistant des Forster père et fils . Il en fera le récit en 1787 , en français . C'est aussi à lui que l'on doit la première description du Diamant quadricolore Erythrura prasina en 1788 .
- Sénégali de Verreaux (Hypargos margaritatus) et Colombe de Verreaux (Leptotila verreauxi) ; le français Jules Verreaux (1807-1873) fit , très jeune (à 11 ans) un voyage de 3 ans en Afrique du Sud en compagnie d'un oncle , puis retourna y vivre de18 à 31 ans : aidé de son frère Edouard , il fournissait de nombreux spécimens à leur père qui tenait à Paris un commerce d'objets d'histoire naturelle . Nommé naturaliste-voyageur au Muséum de Paris en 1842 , il part en Australie et en Tasmanie d'où il revient 5 ans après, avec une collection de 15 000 spécimens .
- Diamant de Kittlitz Erythrura trichroa (Kittlitz1833) ; Heinrich von Kittlitz , bien qu'allemand fit un voyage autour du monde avec une expédition russe de 1826 à 1829 , à l'issue duquel il ramènera au muséum de Moscou plus de 300 espèces d'oiseaux .
- Colombe de Buckley Columbina buckleyi (Sclater & Salvin 1877) ; l'américain Samuel B. Buckley (1809-1884) est bien plus connu en tant que botaniste ( il a d'ailleurs un chêne qui porte son nom ) que comme géologue ou zoologue . Un rapace américain porte également son nom : Carnifex de Buckley .
- Chardonneret de Yarrell Carduelis yarrellii (Audubon 1839) ; William Yarrell a d'abord pris la suite de son père comme agent de change , puis excellent naturaliste , il devint trésorier de la Société linnéenne de Londres . En 1843 , il publie "The history of British Birds" , un livre accessible au grand public , illustré de jolies planches en couleurs qui le rendra populaire .
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