La dénomination des oiseaux
Quelques noms .
Une liste d’espèces d’oiseaux ne se lit pas comme un livre de chevet, mais c’est néanmoins une mine inépuisable pour qui aime la poésie des mots et se plait à rêver en découvrant les noms de ces « oiseaux des îles » .
Les naturalistes des 18èmes et 19èmes siècles, qu’ils aient une fortune personnelle ou qu’ils soient médecins ou directeurs de muséums, se devaient d’avoir de hautes protections pour pouvoir voyager et payer leurs collaborateurs . On comprend ainsi que l’on retrouve chez les oiseaux qu’ils nommaient des noms évoquant les puissants de l’époque .
Nombreux sont les monarques, les roitelets, les chevaliers et les tyrans ; si le ara est noble, le grallaire est roi, la perruche royale, l’amazone impériale, le brillant impératrice, le manchot empereur, le pic sultan, le canard mandarin, le colombar commandeur ; il existe même un jardinier prince-régent et un bagadais du Roi Albert .
La religion n’est pas oubliée : s’il n’y a plus de papes ( ils sont devenus diamants ou passerins ), il reste des cardinaux, des évêques, des capucins et même un apôtre (gris) . Le mainate est religieux, le faisan prélat, la veuve dominicaine, le vautour moine, l’euplecte monseigneur, l’ibis sacré, le faucon pèlerin et la mouette relique . S’il existe un pic lucifer, on trouve aussi un engoulevent satanique et un organiste diable-enrhumé .
Pour qu’il n’y ait pas de jaloux, en plus d’une grallaire grand-beffroi, j’ai relevé une chouette des clochers, une hirondelle des mosquées et un martin des pagodes .
Après les nobles et le clergé, voici l’armée : le ara militaire, le vanneau soldat, l’amazone mercenaire, le chevalier combattant, le tyran pirate et le monticole espion, sans oublier les 16 gladiateurs .
Comme le grimpar est porte-sabre, le brillant fer de lance et l’oie-armée, il ne faut plus s’étonner si l’on retrouve le troglodyte balafré, la gallicolombe poignardée, l’ithagine ensanglantée, le pic en deuil et de nombreuses veuves .
De par leurs couleurs extraordinairement chatoyantes, certains oiseaux étaient considérés comme de véritables joyaux ; il n’est donc pas surprenant qu’en plus des diamants ( australiens ou océaniens ), on trouve un manakin rubis, une colombe saphir, des incas porphyre et à gemme bleue, un martin-pêcheur aigue-marine, un soui-manga améthyste, une perruche turquoisine, une tourterelle émeraudine et des colibris topaze et héliodore .
Les superlatifs que l’on a attribué à certains oiseaux sont souvent éloquents : enchanteur (mignard), fastueux (paradisier), remarquable (chipui), superbe ou magnifique (ptilopes), flamboyant (soui-manga), admirable (colibri), féerique (lori), élégante (perruche) .
Pratiquement tous les traits de caractères que l’on trouve chez les humains sont aussi évoqués : triste (martin) ou joyeux (bulbul) ; vantard (merle) ou timide (séricorne ) ; odieuse (ninoxe) ou aimable (ariane) ; bavard (tyran) ou silencieux (tohi) ; souriant (méliphage) ou larmoyant (tangara ) .
Plus étonnantes encore sont les associations avec d’autres animaux : le bruant sauterelle, le piaye écureuil, le macareux rhinocéros, le moqueur chat, l’anabate chamois, la crécerelle renard, le synallaxe belette ou la rémiz souris .
On sait que la forme du bec des oiseaux est extrêmement variable ; cela se traduit dans les noms de genre comme : bec-croisé, bec-en-ciseau, bec-en-sabot, bec-ouvert, bec-en-cheville mais aussi dans les noms d’espèce : bec-en-cuillère (martin-chasseur), bec-en-coin et bec-en-faux (grimpars), bec-en-faucille (colibri) et bec-en-croc (milan) .
Il serait possible de poursuivre avec les noms de métier ou d’instruments de musique mais ces énumérations vont finir par lasser .
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